Alors que les tensions entre lâIran et IsraĂ«l atteignent un nouveau sommet, TĂ©hĂ©ran adopte une stratĂ©gie aussi radicale quâinattendue : ralentir volontairement lâaccĂšs Ă Internet sur lâensemble du territoire. Objectif annoncĂ© : freiner les cyberattaques Ă©trangĂšres. Mais derriĂšre cette dĂ©cision se cache une mĂ©canique plus subtile, entre cybersĂ©curitĂ© dĂ©fensive, contrĂŽle de lâinformation, et instrumentalisation du rĂ©seau comme outil gĂ©opolitique. Un nouvel Ă©pisode oĂč censure numĂ©rique, conflits rĂ©gionaux et tactiques de la FATA se mĂȘlent sur fond de guerre hybride.
Quand lâIran ralentit Internet pour contrer les cyberattaques… et plus si affinitĂ©s
đč Un coup de sabre dans la fibre optique
Dans un monde oĂč tout va trop vite, certains choisissent d’aller lentement… trĂšs lentement. Cette semaine, l’Iran a dĂ©cidĂ© de ralentir volontairement son Internet. Non, ce n’est pas une panne rĂ©seau, ni une grĂšve des FAI. Il sâagit lĂ dâune stratĂ©gie dĂ©fensive assumĂ©e pour contrer les cyberattaques supposĂ©ment orchestrĂ©es par IsraĂ«l, dans un contexte dâescalade militaire et numĂ©rique.
« Une mesure prĂ©ventive », selon les mots bien choisis de Fatemeh Mohajerani, porte-parole du gouvernement, relayĂ©e par la police cybernĂ©tique FATA. Traduction ? On ferme les vannes pour que les hackers nâaient plus de flux.
đ§ CyberdĂ©fense ou contrĂŽle social ?
Si cette manĆuvre peut avoir une logique opĂ©rationnelle â perturber les connexions de commande et de contrĂŽle (C2), ralentir les flux de donnĂ©es, retarder les exfiltrations ou briser des chaĂźnes dâexploitation temps rĂ©el â, elle interroge.
Parce quâen vĂ©ritĂ©, les scripts malveillants prĂ©positionnĂ©s nâont pas besoin de 5G pour agir. Et les infrastructures critiques ne sont pas toutes accessibles via Internet public (en tout cas on lâespĂšre).
Alors pourquoi cette dĂ©cision maintenant ? Eh bien, comme souvent, la sĂ©curitĂ© nationale est le meilleur alibi pour le contrĂŽle de la population. Le ralentissement du rĂ©seau affecte dâabord les citoyens : mĂ©dias bloquĂ©s, accĂšs VPN limitĂ©s, applications bancaires et logistiques perturbĂ©es.
đ Une tactique de plus en plus frĂ©quente
LâIran ne fait que rejoindre le club â trĂšs fermĂ© mais en expansion â des Ătats qui utilisent le levier numĂ©rique comme outil de dissuasion gĂ©opolitique ou de rĂ©pression interne.
Voici quelques cas récents :
- Myanmar (fĂ©vrier 2021) : coupure totale aprĂšs le putsch militaire. Objectif : empĂȘcher les citoyens de sâorganiser.
- Inde â Cachemire (aoĂ»t 2019) : blackout prolongĂ© pour Ă©touffer les tensions autour du statut de la rĂ©gion.
- Kazakhstan (janvier 2022) : Internet coupé lors de révoltes sociales, combiné à une surveillance renforcée.
- Russie (2022) : bridage et redirection du trafic suite Ă lâinvasion de lâUkraine, avec un Internet « souverain ».
- Ăthiopie (2020-2023) : coupures pĂ©riodiques pendant la guerre civile au TigrĂ©.
- Soudan (2023) : guerre civile = blackout réseau quasi total.
đ Pourquoi ça fonctionne (un peu)
Dans un conflit numĂ©rique, ralentir le dĂ©bit, câest un peu comme faire passer un hacker en sandales sur de la lave : il y parviendra peut-ĂȘtre, mais pas sans douleur.
Voici quelques effets concrets :
- đ„ RĂ©duction de l’efficacitĂ© des attaques Ă commande distante.
- â Inhibition des outils de collaboration dâĂ©quipes de hackers.
- đ Moins de risque dâexfiltration massive ou de ransomwares avec serveurs externes.
Mais attention : les vrais attaquants ont déjà un pied dedans, en local, ou via des implants dormants. Et les malwares modernes sont assez autonomes pour frapper sans connexion continue.
đź Et maintenant ?
Cette dĂ©cision est un signal fort. Elle montre Ă quel point la frontiĂšre entre guerre classique et guerre cyber sâefface. Dans les mois Ă venir, on peut sâattendre Ă :
- un durcissement de la censure en Iran,
- une recrudescence des attaques via réseaux locaux ou supply chain,
- et, soyons honnĂȘtes, une utilisation accrue de cette « cyberpause » comme outil politique.
đ Ă retenir
- Le cyberespace est devenu un théùtre d’opĂ©rations actif.
- Internet est une arme : il peut servir, mais aussi ĂȘtre dĂ©sactivĂ©.
- Ralentir Internet ne ralentit pas les idées, ni les IA.